Quelles alternatives au dispositif RGE ?
Nous ne sommes pas dans une simple posture « anti » qui consisterait à vouloir juste faire en sorte que rien ne change. C’est tout l’inverse, puisque consacrant la majeur partie de notre activité à travailler sur des constructions écologiques et performantes, nous sommes encore plus que quiconque préoccupés par la situation du bâtiment en France. Mais, nous ne pensons pas que la démarche RGE ne soit la bonne manière d’avancer, et qu’au contraire elle fait de petits pas… dans la mauvaise direction en oubliant complètement les objectifs initiaux d’améliorer le bilan environnemental des constructions.
Cette page énumère ainsi quelques propositions d’actions alternatives au système RGE, qui pourraient le remplacer avantageusement en produisant de meilleurs résultats et sans les effets pervers que nous avons dénoncés. Ce ne sont pas des propositions pour édulcorer le RGE. Ce sont des propositions pour n’avoir plus du tout besoin du principe même du RGE, en traitant l’origine du problème et non ses symptômes.
VISIBILITÉ DES COMPÉTENCES
1- Faire émerger l’usage des bonnes démarches de conception des projets
Ce qui manque sur le terrain c’est une cohérence globale des projets, et on ne l’obtiendra pas en formant 3 jours les artisans. On l’obtiendra en encourageant les propriétaires à faire intervenir une autre personne, qu’ils ne vont pas voir actuellement, dont le métier est de faire un travail global avec une vision d’ensemble du projet de rénovation. Ces professionnels existent partiellement déjà : certains architectes, certains thermiciens, certains artisans. Pour le moment, il leur est très difficile d’expliquer en quoi leur travail est utile, et en quoi il est différent de ce que proposent les autres pour beaucoup moins cher. Ce sont eux qui ont besoin de visibilité, car ce sont eux qui sont à même de proposer aux propriétaires une liste de travaux à réaliser qui atteindrons les objectifs visés (tant en terme de performance, que de coût, de durabilité ou encore de qualité environnementale). Pour le moment ils sont recalés par le marché parce qu’ils sont plus chers que la démarche classique qui consiste à ne pas réfléchir avant d’agir. Les subventions aux produits sont une double peine qui les achève, puisque le consommateur est directement incité à foncer directement vers les travaux (peu importe leur pertinence).
Nous ne sommes pas les seuls à aller dans ce sens : l’UFC que choisir appelle de ses vœux un « architecte énergéticien » pour faire de même, et le rapport de l’OPECST sur les freins réglementaires à l’innovation en matière d’économies d’énergies dans le bâtiment formule lui aussi une proposition analogue.
Nous nous différencions en revanche sur la manière de créer cette visibilité pour ce nouveau métier. Tant l’UFC que choisir que l’OPECST préconisent une certification de ces acteurs, via formations et procédures bureaucratiques habituelles. C’est dommage, car ils ont pourtant identifiés que ces procédures sont justement le plus gros frein à l’innovation. Il y a bien un besoin pour le particulier de pouvoir déterminer qui sont les professionnels compétents. Mais ce n’est pas via des certifications de formations qu’il faut faire ça, si notre objectif est bien de viser des résultats et non des moyens, il faut sélectionner les professionnels par leur résultats aussi, et non par leurs moyens.
La certification devrait, puisque l’objectif c’est de faire avancer les résultats, être donnée de la manière suivante :
Pour ceux qui peuvent déjà justifier d’une expérience sur le sujet > évaluation de la réalité des projets réalisés, et de la réalité de leurs performances. Si elles sont réelles, certification d’office, peu importe les diplômes ou absence de diplômes du praticien puisque les résultats sont là. Vérification tous les 3 ou 4 ans que la qualité du travail est maintenue et perdure. Enfin le nombre de projets évalués doit être proportionnel à la taille de la structure : une personne qui travaille seule ne doit pas avoir à justifier d’autant de projet par an qu’une entreprise de 100 personnes ! L’évaluation doit être réalisée par un regroupement contenant des représentants de l’ensemble de la société : professionnels, fonctionnaires, élus, associatifs et particuliers, de sorte à éviter les commissions opaques, conflits d’intérêts et clientélisme.
Pour ceux qui débutent > Évaluation par des pairs des connaissances de base et de la motivation, et délivrance d’une certification « à l’essai » valable pour 2 ans. A l’issue de ça, on fait la même chose que ceux qui ont de l’expérience, en regardant si ce qu’ils ont fait dans ces deux années d’essai a porté ses fruits et mérite le certificat, ou si les résultats ne sont pas bon, ce qui fait perdre le certificat provisoire. Si les pairs ne sont pas d’accord pour donner initialement la certification provisoire, ils doivent conseiller une formation ou un apprentissage qui permettra à la personne évaluée d’acquérir l’expérience et/ou les connaissances manquantes. Il s’agirait là d’une formation conduisant à la capacité réelle d’effectuer le métier, donc pas d’une vague formation-information de 3 jours. Cela pourrait rebondir sur les propositions de l’OPECST de créer des filières universitaires pour ces métiers. Mais il faudra sans aucun doute envisager de nombreuses filières-passerelles, permettant de suivre le cursus malgré des connaissances de bases très différentes, selon que les gens viendront du monde des architectes, de celui des techniciens, ou de celui des ouvriers de terrain, ou encore de secteur autre que le bâtiment.
Mais il est absolument capital d’éviter de tout planter avec des exigences de formations initiales ou continues comme unique pré-requis pour les certifications ! sinon on se remet dans l’exigence de moyens (formation) et non de résultats et on bloque l’émergence de l’innovation. Savoir comment le résultat a été obtenu et par qui n’est pas important, du moment qu’il est là. L’innovation passe par des chemins imprévisibles, c’est inévitable et on le sait, alors ne les bloquons pas. D’ailleurs, si quelqu’un est assez malin pour obtenir le résultat avec un nouveau moyen de son invention, meilleur que ceux qui existent déjà, il mérite de pouvoir en faire le commerce : c’est la base de toute entreprise.
L’état devrait financer ces évaluations pour qu’elles ne coûtent rien ni aux entreprises qui fournissent les jurys, ni aux gens qui les passent. Ainsi, les citoyens profiteront directement de l’augmentation du nombre de professionnels compétents, ce qui fera baisser leurs prix (au lieu de voir ce nombre stagner, et les prix augmenter du montant des aides allouées, comme c’est le cas actuellement).Et on ne pourra pas dévoyer une procédure de certification si elle est transparente, citoyenne, et basée sur l’évaluation de résultats réels.
2- Exemplarité de la commande publique
Pourquoi continue-t-on à choisir le moins cher et des projets inefficients sur toutes les commandes publiques, tout en subventionnant les travaux des particuliers pour faire l’inverse ? Ne pourrait-on pas plutôt ne plus subventionner et utiliser cet argent pour construire des bâtiment publics exemplaires, qui guideraient ensuite directement l’ensemble de la société et son socle culturel vers de meilleurs choix ? ça ne coûterait rien de plus de mettre l’argent à un endroit différent (et en augmentant l’économie liée aux commandes publiques, ça boosterait l’économie tout court ce qui par voie de conséquence augmenterait in fine les moyens des particuliers en leur donnant plus de pouvoir d’achat )
Un code des marchés publique qui ne prend pas en compte les frais de fonctionnement, ni les frais de fin de vie : il faut changer ça, si on veut sérieusement envisager que les commandes privées s’en préoccupent aussi.
3- Donner une carte d’identité aux bâtiments
Les constructions durent au moins un demi siècle, et souvent plus, elles changent donc plusieurs fois de propriétaires qui ne conservent pas toujours très longtemps les informations sur leur nature. D’ailleurs, la plupart des propriétaires particuliers n’ont même pas ces informations pour leur construction neuve, pour laquelle la documentation fournie est généralement plus faible que le manuel de n’importe quelle babiole électroménagère !
Il est nécessaire non pas juste de mettre une étiquette énergie sur le bâtiment quand on veut le vendre. Il faut lui adjoindre une véritable carte d’identité qui détaille ce qu’il est, de quoi il est constitué, comment il fonctionne, comment il doit être entretenu. Si ces informations existaient, plus personne ne craindrait de se faire avoir par le baratin d’un spécialiste qui profite de l’ignorance des autres. De même le diagnostic serait grandement facilité puisqu’il n’y aurait plus nécessairement besoin de faire venir un expert pour essayer de déterminer à quoi on a affaire : on saurait déjà presque tout rien qu’avec les documents liés à l’ouvrage. On connaîtrait ses forces, mais aussi ses plus gros défauts permettant d’avoir le liste des travaux contre-indiqués.
L’évaluation des performances de l’ouvrage et des incidences de ses occupants serait elle aussi grandement facilitée, puisque la part fixe liée au bâtiment serait connue d’avance. Les occupants ne seraient donc plus dans l’incertitude de savoir si leurs consommations anormalement élevées sont dues à un défaut de leur bâtiment, ou si elles sont dues à son mauvais usage. De très nombreux conflits propriétaires-entreprises seraient ainsi évités, et les consommateurs responsabilisés sur les résultats réels de leur mode de vie.
Cette information peut paraître intrusive en ce qu’elle vient à l’intérieur de la « propriété privée » mais en réalité, c’est un bonus pour tous les propriétaires. Avoir la carte d’identité réelle de leur bien, avec des certitudes sur ce qu’ils possèdent, sa valeur, la manière dont ça doit être utilisé et entretenu pour que ça dure est une garantie que le patrimoine qu’ils ont ainsi acquis soit durable. Ce n’est pas un flicage de plus, c’est un bonus d’information qui permettrait d’éviter de se faire escroquer par des « spécialistes » avec des discours incompréhensibles pour le profane.
D’un point de vue strictement légal, il y a un précédent au fait d’accrocher une information non pas sur le propriétaire, mais sur le bien : c’est le cas de toutes les assurances.
Le rapport de l’OPECST propose lui aussi une recommandation similaire. « la maison de demain n’est pas une maison intelligente, c’est une maison qui rend ses occupant intelligents. »
Attention toutefois à ce que cette carte d’identité ne soit pas mise en place en utilisant des outils de communication High tech dont la durabilité des informations est aussi faible que celle de leurs supports. La carte d’identité devrait être au moins aussi durable que le bâtiment (c’est à dire que dans 50 ans, sans l’avoir jamais consultée, n’importe qui devra pouvoir la retrouver et la lire sans difficulté.)
4- Information des consommateurs vaut mieux que formation des professionnels
Toutes les démarches voulant provoquer une amélioration de la qualité des travaux conduisent immanquablement à la préconisation de faire de la formation pour les professionnels… et elles font toutes fausse route.
Les professionnels sont des acteurs économiques, ils dépendent totalement pour survivre de l’existence de leurs clients. A part pour certaines très grandes entreprises ayant les moyens de se payer une luxueuse propagande, toutes les autres sont minuscules et sont bien obligées de répondre à la demande qu’on leur fait. Si tous les clients continuent de leur demander des solutions bas de gamme, inefficientes, et choisissent le moins disant, peu importe la quantité d’argent dépensée pour former les entreprises : rien ne changera. Il faut prendre gare aussi au fait de monter des filières de formation qui vont attirer des jeunes enthousiastes et… les envoyer directement au chômage à la sortie, faute de débouchés économiques.
Bien sûr que les professionnels ont une responsabilité sur la mauvaise qualité d’un travail mal fait. Mais ceux qui font vraiment du sale boulot disparaissent normalement assez vite aussi. Si l’ensemble perdure, c’est qu’il y a une clientèle pour ce sale boulot. Ce n’est pas normal que des gens acceptent de payer pour un travail mal fait ? En effet, sauf s’ils sont si ignorants et mal informés qu’ils ne s’en aperçoivent pas (ou trop tard, car dans le bâtiment toutes les malfaçons ne se révèlent pas forcément très vite).
Le plus gros déficit actuellement n’est pas sur la formation donnée aux pro, mais sur l’information donnée aux consommateurs dont l’esprit est bien plus rempli par la propagande des publicitaires que par de l’information pertinente et utile. C’est donc plus sur ça qu’il faut agir que sur la formation. Dès qu’un marché se dégagera, des professionnels se formeront très vite pour y répondre, et on n’aura pas besoin de les y pousser.
ORGANISATION
1- Relocaliser les compétences
Le système français est trop centralisé, et étouffe des initiatives locales pourtant méritoires. Alors qu’on reconnaît que les impératifs d’une région à l’autre sont très différents, tant en terme de climat que de moyens ou de besoins, de réseaux, de cultures, on ne s’appuie pas dessus. Il est nécessaire de rétablir le principe de subsidiarité, en donnant par exemple aux régions plus de possibilités de déterminer leurs propres manières d’aboutir aux objectifs d’amélioration des bâtiments. Même les experts en rénovation devraient avoir des connaissances différentes selon les secteurs et la typologie de bâtiments sur lesquels ils interviennent, car il n’est pas possible de tout savoir sur tout. Chaque région a des patrimoines différents, chaque région doit donc déterminer avec ses professionnels et sa population, la meilleure manière de le traiter. L’état ne doit pas bloquer les initiatives locales, il ne doit pas non plus imposer des procédures nationales qui deviennent contre-productives lorsque certaines spécificités locales ont été oubliées par les technocrates parisiens qui ne les connaissent pas.
L’OPECST formule là aussi une proposition similaire : « la France est malade d’un centralisme hypertrophié. Les régions ont à notre sens la bonne taille pour explorer des applications concrètes, pour expérimenter, pour intégrer les retours de l’expérience. »
2- Sortir d’une logique d’évaluation uniquement centrée sur la performance thermique
La tentative de lutte contre le changement climatique ne doit pas se faire au détriment des autres problèmes de pollution. D’une part il est déjà bien trop tard pour éviter ce bouleversement, d’autre part ce n’est pas la seule menace qui pèse sur nous. Nous épuisons les ressources fossiles et renouvelables, nous polluons le sol, l’air et l’eau de milliers de produits chimiques sans avoir vérifié leur innocuité. Nous détruisons les sols arables en cultivant industriellement, et en brisant le cycle de l’azote en libérant les excréments animaux et humains dans l’eau, au lieu de les réinsérer dans le cycle de l’humus des sols. etc.
Il est nécessaire de mettre en place des analyses multi-critères des projets, neufs ou rénovation, de sorte à sortir d’une myopie technicienne où seul compte le bilan thermique réglementaire. Ceci rejoins le point ci-dessus, car selon les territoires, les différentes formes de pollutions ne posent pas les mêmes problèmes. Dans les zones agricoles submergées de nitrates par exemple, une réflexion particulière menée sur la gestion de l’eau aura sans doute plus de poids qu’ailleurs, alors qu’en site urbain l’attention portée aux moyens de transports et aux interactions avec les bâtiments voisins pourrait être prioritaire.
Cette analyse multicritère ne doit surtout pas être standardisée et centralisée : ce serait la pire de choses possibles. Pour qu’elle ai un sens, il est nécessaire qu’elle soit déterminée par l’ensemble des acteurs des projets, et serve non pas de cadre pour les contraindre, mais de guide pour leur permettre de bien voir sur quels points leur projets est bon, et sur quels autres ils sont mauvais. Cette manière de travailler doit conduire à une re-responsabilisation des gens devant ce qu’il font et les raisons qui les guident dans leurs choix.
L’état pourrait fournir une trame, mais les régions sont bien mieux placées pour le faire, d’autant plus qu’elles ont pour certaines déjà commencé.
FINANCEMENTS
1- Subventionner les démarches de conception globale plutôt que les produits
Il faut au minimum conditionner l’obtention d’aides au fait d’avoir commencé par adopter une démarche de conception générale du projet de rénovation en amont des travaux. Mais il faudrait encore mieux complètement arrêter d’aider les produits et systèmes, pour subventionner à la place les réflexions préalables à un projet de rénovation, de sorte à injecter l’argent directement dans les réflexions qui vont faire émerger de nouvelles solutions, plutôt qu’à continuer à subventionner la suprématie de solutions banales produites par de très grosses entreprises, qui ne constituent même pas le gros de l’économie (et qui n’ont aucun besoin d’être subventionnée pour rémunérer leurs actionnaires).
L’OPECST propose la même chose, conseillant de même la disparition progressive de toutes les subventions portant sur des systèmes, et pointant le fait que ce genre de subvention tend naturellement à profiter bien plus aux produits en phase d’obsolescence fabriqués par de grands groupes bien établis qu’aux nouveautés fabriquées par des PME, ce qui est totalement contre-productif.
Sur 126 Milliards d’€ de travaux, 45 le sont par des entreprises de 0 à 10 salariés, et 41 autres par celles de 10 à 50 : soit les 2/3 de l’activité du secteur du bâtiment sont le fait d’entreprises minuscules, et les 3/4 par des PME de moins 200 personnes. Pourtant l’essentiel des aides ne profite qu’aux productions des plus grosses : n’y a-t-il pas comme une erreur dans l’énoncé ?
2- Subventionner la recherche plutôt que les travaux
En injectant l’argent dans les recherches (technologiques comme les isolants aérogels ou matériaux à changement de phase, mais aussi sur des produits biosourcés moins polluants, ou encore sur le fonctionnement exact des techniques de correction thermique traditionnelles pour pouvoir les prendre en compte dans les logiciels, mais également sur le fonctionnement thermique des murs anciens construits avant la période industrielle, ou encore sur le comportement aux séismes des solutions tout béton armé par rapport à celles utilisées auparavant… ) on tirerait vers l’avant tout le secteur du bâtiment vers l’adaptation nécessaire au futur, alors qu’en continuant à mettre l’argent sur des techniques finalement banales de chaudières, isolants conventionnels ou pompes à chaleur, on ne fait que prolonger l’immobilité et l’absence de réelle transition.
3- Modifier la taxation sur les matériaux pour prendre en compte leur énergie grise incorporée
Tant que le coût financier n’est pas cohérent avec le coût écologique, il restera avantageux financièrement d’utiliser les solutions polluantes, et donc, on continuera de polluer. Le problème est très simple, il n’y a pas lieu de tergiverser : si on veut que ça change, vraiment, il suffit de faire en sorte que le coût réel corresponde au coût environnemental.
Tant que ce n’est pas fait, construire une maison neuve continuera de coûter moins cher que d’en rénover une. En effet, la rénovation comporte quelques étapes en plus, démolition, transformation diverses, mais demande également de s’adapter à ce qui existe ce qui provoque plus de pertes (matériaux, temps, etc.). C’est donc toujours plus cher, à surface et performance équivalente. Pourtant, nous savons tous qu’il est nécessaire de rénover le parc construit si on veut pouvoir réduire notre pollution assez vite, car se contenter de la seule évolution induite par les constructions neuve est beaucoup trop lent. En outre, l’écobilan de la rénovation est généralement bien meilleur que celui de la construction neuve, car l’essentiel des choses lourdes qui consomment beaucoup de transport sont conservées, et l’énergie grise ainsi reste incorporée. C’est pourquoi il faut faire en sorte que le prix du neuf prenne en compte le coût environnemental induit, certes cela va considérablement augmenter son prix, mais ce qui sera prélevé en taxe sur le neuf pourra être réinjecté pour financer les recherches ou les subventions décrites plus haut. Quand à la rénovation, qui représente déjà actuellement plus de la moitié des travaux, elle subira un coup de fouet sans précédent, rien que du fait qu’elle deviendrait enfin largement plus rentable financièrement. (un effet secondaire intéressant sera aussi de réduire la pression foncière sur le neuf qui provoque une spéculation délirante et la hausse du prix des terrains, principal responsable de l’inflation des prix de l’immobilier).
Enfin, cela permettrait aussi de rééquilibrer un peu la concurrence déloyale qu’il y a actuellement entre la main d’œuvre humaine, taxée, et la main d’œuvre mécanique, qui ne l’est pas. A partir du moment où on fera payer la pollution induite par la consommation du carburant, le prix de revient du travail fourni par une machine va considérablement augmenter, ce qui redonnera à certains travaux non mécanisable un prix acceptable. Songez qu’actuellement, construire en terre crue est plus cher que construire en ciment, uniquement à cause du prix artificiellement gonflé de la main d’œuvre. Historiquement toutes les solutions préindustrielles réservées aux pauvres sont devenues aujourd’hui des solutions… de luxe, uniquement du fait des machines. Si l’on faisait payer le prix environnemental, le mur en terre crue réalisé avec la terre du site, ou en paille locale, ne coûterait presque plus rien, alors que celui construit en ciment d’importation montrerait son vrai coût.
En outre, une grande partie du problème du chômage actuel vient justement du fait que le travail mécanique n’est pas taxé et que nous n’avons produit aucune alternative de société post-mécanisation. L’objectif initial de la mécanisation n’était pas de mettre tout le monde au chômage en polluant toute la planète, mais de réduire les travaux pénibles pour laisser aux êtres humains les tâches moins ingrates.
Il semble qu’on ai raté un virage quelque part au vingtième siècle, il est grand temps de reprendre le contrôle de notre trajectoire.
Bravo pour cet article édifiant et rempli de remarques intelligentes et si pertinentes…
Tout est dit ou presque. Espérons que les fameux « consommateurs » se réveillent un jour et deviennent un peu plus responsables et acteurs de leur vie.. et donc de leur habitat.. Espérons.
Merci pour votre précieux travail et votre engagement en tout cas.
Cdt,
Nicolas Delaunay